Il paraît que lorsqu’on emménage dans une nouvelle ville on est encore plus obligés que les anciens habitants de participer aux fêtes et à tous les rassemblements de quartiers. C’est stupide, et gênant pour beaucoup, mais surtout pour ceux qui essaient définitivement de s’installer sans faire trop de bruit autour de leur emménagement, ou simplement parce qu’ils n’aiment pas la compagnie de trop de personnes. Beacon Hills fête son anniversaire, aujourd’hui, quel âge cela lui fait ? Ils n’en ont aucune idée, mais Monsieur et Madame Spade veulent bien se joindre aux festivités, mais sans trop être centre de l’attention comme les autres personnes qui emménagent en ce moment. Ils sont calmes, très éloignés des réunions bruyantes et peu fervent d’animations trop longues ou trop lentes. Daniel, leur fils, n’est pas gêné à l’idée d’y participer, même s’il aurait préféré rester à domicile ce jour-là. Il allait y avoir beaucoup trop de personnes à son goût, et il se sentirait très vite mal à l’aise, trop de personnes autour de lui, c’est comme l’enfermer dans une pièce étroite. Il en a peur. Et c’est l’esprit lourd qu’il s’en alla rejoindre les festivités. Tandis que ses parents s’étaient éloignés dans leur coin, pour faire connaissance avec d’autres parents autour de quelques verres, Daniel prit la peine de s’éloigner lui aussi, mais pour être plus à l’écart des gens que pour faire connaissance avec eux. Presque recroquevillé dans son coin, il n’est pas certain de comprendre la nécessité de tout cela. C’était trop ordinaire à son goût, trop ennuyeux. Il n’y avait pas assez de rebondissements et ça l’agaçait quelque peu. Pour s’occuper, Daniel se mit à observer toutes les têtes qui faisaient cette masse de gens rassemblés, ils étaient tous de bon humeur, c’était certain. Il reconnut quelques visages qu’il avait aperçu parfois, d’autres qu’il connaissait un peu mieux  mais la plupart lui étaient parfaitement inconnus. Il soupira et chercha du regard sa mère, l’aperçu et fut rassuré, elle aussi s’ennuyait. Monsieur s’était trouvé un partenaire avec qui discuter de voitures, et elle ne servait plus que de décoration. Elle lui lança un regard sévère mais pas mauvais, elle lui fit comprendre qu’il devait essayer de s’intégrer aux autres jeunes.

Quand il fit quelques pas, finalement, quoiqu’un peu boudeur à l’idée d’initier la conversation avec des inconnus, le ciel se mit à gronder. Puis à se tordre, et dans un gigantesque carnage, une nuée noire de plumes, de becs et de serres vint fendre l’air autour de lui et des autres ; des centaines et des centaines d’oiseaux enragés attaquèrent tout et tout le monde, Daniel ne fut pas épargné, une dizaine d’oiseaux s’acharnèrent sur lui, arrachant sa chemise et lui griffant les bras, autant qu’ils lui piquaient le dos et les jambes, il fut griffé au niveau des lèvres mais avant d’être plus en mauvais état, il parvint à repousser dans de grands gestes les nombreux oiseaux, ne se privant pas pour en frapper avec colère masquée de douleur. Et puis, plus rien. Les oiseaux s’en allèrent, et le carnage de leur passage fut la seule preuve de leur venue. Daniel ne trouvait plus ses parents au loin, ses vêtements étaient en lambeaux et il souffrait d’une façon qu’il n’avait jamais souffert.