Depuis toujours, j’aime courir. Depuis que je suis arrivé à Beacon hills, j’ai pu reprendre un rythme tranquille. C’est seulement depuis que j’ai repris l’habitude de courir tous les matins que je me rends compte que ça m’a vraiment manqué. C’est vrai que je suis dans une ville où je ne connais personne, mais au moins je peux souffler un peu avant de commencer mes recherches.
C’est en début de matinée que je quitte ma chambre d’hôtel où je suis logé depuis maintenant une semaine. J’avais repéré un parc pas très loin de l’hôtel, c’est en trottinant doucement que je m’y rends. Comme à mon habitude, je n’ai pas cherché à me lier aux autres coureurs, bien que j’ai droit maintenant à des petits signes des habitués.
Sans me presser, je fis mes étirements avant de commencer, faire le tour du parc. Au bout d’une demi heure de course, mon attention fut capté par des éclats de voix. Après hésitation, je pris la direction du bruit.
Deux femmes en pleine dispute. Ne jamais se mêler d’un conflit entre deux femmes. Aucune des deux ne m’avait vu arrivé, je m'apprêtais donc à filer discrètement quand les choses prirent une tournure surprenante : la plus vielle des deux, et visiblement frustré de sa propre vie, venait de gifler la plus jeune, assez jeune en fait. Elle ne devait pas avoir plus de 15 ou 16 ans.

Ça va pas ou quoi ? Vous avez pas le droit de me frapper !

La vieille ne semblait, pas le moins du monde, regretter son action. Elle n’a pas du souvent en prendre de claques celle-là.

Voilà, j'espère que ça t'aura remis les idées en place petite mal éduquée, tes parents doivent avoir honte !

Oula! Elle va loin la vieille pour une histoire de pipi sur une paire chaussures qui a dû voir passer les deux guerres mondiales.
La plus jeune sembla perdre le peu de sang-froid qu’il lui restait. Je n’avais toujours pas vu son visage, mais lorsqu’elle se mit à parler, il était évident que les larmes n’étaient pas loin.

Ils peuvent pas avoir honte, ils sont morts ok ? Vous voyez vos problèmes sont débiles ! En plus vos chaussures elles sont même pas belles, et vous savez quoi je suis même pas désolée que mon chien vous ai fait pipi dessus car c'est sûrement une vieille femme odieuse dans votre genre qui l'a abandonné, et, et, vous savez quoi d'autre je vous déteste !

Bah bravo la vieille! Visiblement, elle se savait plus comment réagir face à la tirade de la jeune fille en détresse. Alors qu’elle allait ouvrir à nouveau la bouche, la vieille dame sembla enfin prendre conscience de ma présence. En trop pas, je les avais rejoints.

Je pense que vous en avez fait pour une histoire de pipi. Allez vous en.

Elle se crispa sur elle-même, visiblement terrorisée par ma simple présence, elle récupéra ensuite son sac à main avant de fuir précipitamment. Pourquoi je ne frappe pas les femmes déjà ? Elle mériterait bien une exception celle-là.
Je reportais alors mon attention sur la petite blonde en pleure près de moi. Elle ne sembla même pas avoir conscience qui la vieille peau était partie ; elle sanglotait, là debout devant moi. Je lui pris le bras avant de l’inciter à s'asseoir sur le banc en face.

ça va aller ?

C’est à cet instant que j’ai croisé pour la première fois réellement son regard et que j’ai réellement vu son visage. Elle semblait me regarder sans réellement me voir.

hey! Tu es sûr que ça va ?

hey! Tu es sûr que ça va ?

Je ne suis pas qu’elle aille bien. Elle ne semble même pas avoir conscience que je suis là avec elle. Ah ! Elle finit de se reprendre et se tourner vers moi. Son regard… Je n’ai encore jamais vu un regard  comme le sien. Elle me sourit avant de me répondre.

Oui, ça va.

Elle a visiblement l’habitude de garder  ce qu’elle ressent pour elle, vu le sourire plastifié qu’elle vient de me faire. Elle est pourtant belle, pas besoin de faire ce genre de sourire. Je déteste ça.  Je ne vois même pas pourquoi ça m’agace je ne la connais pas. Mais c’est dommage que déjà à son âge, elle ressente le besoin de cacher ses émotions.
Je relève à nouveau les yeux et je recroise de nouveau son regard. Elle n’est pas simplement humaine ; c’est impossible.  Son regard est un véritable arc-en-ciel.  Je n’avais encore jamais vu ça malgré mon activité  professionnel.    
je me sens complètement absorbé par  ce regard  qui me fascine.  Je doute qu’elle ait conscience  du fait qu’elle soit une créature  surnaturelle.  Malgré son regard presque fluorescent, je ne sens pas l’agressivité que j’ai ressentie dans le regard des autres créatures que j’ai rencontré.

Merci, c'est gentil mais je vous assure que ça va.

J’ai entendu son intervention mais je suis trop concentré  sur son regard et  tenter  de deviner ce qu’elle est pour prendre le temps  de lui répondre.  Sur tout qu’elle semblait se rendre compte que je la fixe depuis un moment.

Il ne me semble pas qu'on se soit présentés, je suis Nina. Et lui c'est JD, rassurez-vous normalement il ne fait pas pipi sur les gens.

Elle doit vraiment être mal à l’aise, elle tente de combler le vide  vu que jusque je ne parle pas.

Et vous, c'est quoi votre nom ?

Je plisse de nouveau les yeux.  Mais qu’est-ce qu’elle est  bordel ? je n’y arrive pas. J’y suis toujours arrivé.

Euh, j'ai un truc sur le visage ? C'est que vous me regardez bizarrement...

Je crois qu’elle panique,  je devrais peut-être  dire quelque chose pour la rassurer.

Qu’est-ce que t’es ?

Je suis lycéenne, j'étudie au lycée de Beacon Hills ... Vous ne m'avez toujours pas dit votre nom ?

Voilà ce qu’elle me répond… Je ne sais pas si elle n’a vraiment pas compris ma question, ou si elle fait exprès. Je passe doucement la main dans mes cheveux alors que je vois bien qu’elle commence à être mal à l’aise. Si cela se trouve, son coté surnaturelle est encore en veille.
Je ne me sens pas menacé comme à mon habitude quand je croise une personne avec des capacités non-humaine.

Je m’appelle Kenneth.

Pas besoin de donner plus d’infos que nécessaire. De toutes les façons, je ne pense pas qu’elle s’intéresse réellement ce que je dis. Elle doit probablement feindre un intérêt par simple politesse comme elle fait semblant d’aller bien.
Elle sembla contente que je finisse par me présenter, elle m’offrit un vrai sourire. Je ne peux m’empêcher de répondre à son sourire.

Je préfère ce sourire : les sourires faux ne te vont pas. Là, ça va vraiment mieux, pas vrai ?

Elle parait surprise, mais ne perd pas son sourire.

Oui ça va mieux, merci ! Et vous ? Vous faites quoi dans la vie.

eh ! bah ! Elle ne  perd pas son temps  la  cocotte. Je la regarde dans les yeux et comprend qu’elle doit  vouloir changer de sujet. Le fait que j’ai compris qu’elle faisait semblant, a l’air de la gêner.  je me sens sourire doucement, ça fait un moment que je n’avais pas spontanément souri de cette façon.  Cette fille a vraiment quelque chose particulier. Je me demande ce que c’est : j’aimerai vraiment le découvrir.

Vous habitez dans le coin ?

Elle veut vraiment  savoir, dis donc.  Je sens mon propre sourire s’agrandir alors qu’elle me regarde. J’aime  bien la voir cogiter quand je prends du temps pour répondre. Elle mordille sa lèvre inférieure et fronce légèrement les sourcils à chaque fois.  

Je suis en vacances ici. Disons que j’ai pris une année  sabbatique loin de tout.

Elle semble toute contente. Elle est mignonne. Il faut que j’arrête de la regarder comme je suis en train de le faire. C’est une gosse.  Il vaut mieux que je parte d’ici et vite.

Je viens à peine de répondre à sa question que je la vois se crisper légèrement. Elle est repartie dans ses pensées. Et on dirait bien qu’elles ne sont pas très réjouissantes. Elle change de pose, je ne peux plus voir son visage. J’ai vraiment envie de la rassurer. Je ne suis même pas sûr que je suis le responsable, mais j’ai l’impression qu’elle est perdue et qu’elle ne sait plus où elle en est.

Peut-être que son coté surnaturelle cherche à se manifester et cela expliquerait pourquoi elle a l’air d’avoir tellement peur. Elle me donne envie de la protéger, de veiller sur elle ou juste de la prendre dans mes bras. Mais je ne la connais même pas. Mais je suis persuadé qu’elle n’est pas dangereuse comme toutes les créatures que j’ai rencontrées jusque-là.
Elle finit par se tourner vers moi avec un sourire, un vrai. Bordel.

Une année sabbatique ? J'aimerais pouvoir en faire autant !

Après un petit temps d’arrêt, elle reprit.

C'est pas difficile de tout quitter ? Enfin vous devez bien avoir une famille ou des amis de là d'où vous venez ?

Elle est vraiment trop mignonne et trop belle pour son propre bien. Il faut vraiment  que je parte d’ici et vite. J’ai vraiment un problème. Elle est mineure et je pense que ce à quoi je pense là maintenant perturberait même un adulte de mon âge.

Ça vous dit de continuer cette discussion en marchant ? J'ai bien envie de me dégourdir les jambes.

Je sens qu’elle se calme de plus en plus. Peut-être que je lui fais peur.  Pourtant, je fais vraiment de mon mieux pour ne pas luis faire peur.

Tu…tu n’as pas à avoir peur. Je… je ne te…Enfin, Je ne suis pas…  

Et merde… Si en plus, je me mets à beuguer ça ne va pas le faire. Elle sourit, un petit sourire en coin, le genre que l’on ne devrait pas faire à son âge.

Désolé… on peut marcher si tu veux…

Agacé, je passe la main dans mes cheveux en baissant la tête. Je ne la regarde plus dans les yeux quand je lui dis.

Je peux te raccompagner un peu… enfin si tu veux… ou je  peux te laisser …

Putain de merde, je ressemble à un ado de 15 ans. Je ferais bien de partir d’ici.

J’ai comme l’impression d’être  sous son contrôle et je déteste  ça.  Mais je n’ai plus vraiment envie de courir ou de partir.

D'accord, allons-y.

Elle se met à avancer, je me contente de la suivre. J’ai suffisamment eu l’air d’un idiot pour aujourd’hui. Elle finit par se retourner vers moi pour me dire.

Encore merci pour tout à l'heure, c'est gentil d'être intervenu.

Je ne sais pas vraiment quoi lui répondre, je me contente d’un rapide mouvement de tête avant que l’on ne reprenne la route. Je la suis et ne peux m’empêcher de la regarder trottiner avec son petit chien. Un petit silence s’installe, mais cette fois, ce fut agréable et sans malaise.
Je pris la parole à sa grande surprise.

La communication n’est pas mon fort. Je suis désolé si je t’ai fait peur.

Alors elle se retourna vers moi s’arrêtant elle aussi. Elle me regarda droit dans les yeux avec un léger relever de sourcil. Je savais qu’elle allait me contredire, mais je repris.

Oui, j’ai sentis ta méfiance et ta panique. Mais en même temps c’est une réaction normale.   Je voulais juste te dire que tu n’as pas à avoir peur ;tout le monde n’est pas cruel.

Je lui fis un sourire auquel elle répondit spontanément. Mais celui-ci avait quelque chose de triste ou mélancolique. Avant de m’en rendre compte, je fis un pas en avant de me reprendre. Bordel, j’allais spontanément la prendre dans mes bras. À nouveau nerveux, j’ai passé ma main dans mes cheveux.

Je pense que je ferai bien de rentrer… prends soin de toi, Nina.

Alors que j’allais me détourner d’elle, je sentis sa main agripper mon poignet.