Once upon a time

« Viens m'aider, gros bêta, plutôt que de rire dans ton coin ! »
« Eli, sérieux, a ton âge, ne pas savoir porter un carton sans se casser la figure ... Quelle honte pour une féline ... »

Elliot pousse un petit grognement et rougit, en se redressant, les cheveux en bataille. James soupire et s'approche, prend le carton à bras le corps et tout en secouant la tête d'un air amusé, s'éloigne. Le déménagement ne prendra plus beaucoup de temps. Son regard vert regarde autour d'elle, et les murs blancs, les meubles vides lui donnent un petit coup au coeur. Elle a vécu ici plusieurs années, mais elle savait qu'un jour, elle devrait partir. Elle emporte avec elle les derniers vestiges de ses années passées. Elle a prit le principal : la demoiselle n'est pas du genre à s'attacher aux objets. Quelques vêtements, des babioles ayant de la valeur plus sentimentale que monétaire, un livre ou deux. James l'attend en bas de l'immeuble. Et voilà, fini le lycée, à présent elle entre à l'université. Elliot monte dans la voiture, et regarde avec mélancolie New-York disparaître dans le rétroviseur.

« Tu te souviens quand papa nous amené à New-York ? On avait quel âge, huit ans ? »
« Tu en avais sept, j'en avais onze. On a été très surpris au début, ça changeait de la Normandie. Mais après le divorce, on a choisi son parti. On a bien fait non ? Si on ne l'avait pas suivi, qui sait ce qui se serait passé, à l'adolescence, avec nos transformations ... »
« Papa s'est bien occupé de nous. Il a fait tant de sacrifices ... Je lui en suis très reconnaissante, tu sais ? » fit la brune, car elle savait bien que son frère doutait de ce point là. Preuve était qu'il grimaça, comme si il voulait la croire et ne le pouvait pas tout à fait.
« Papa sait que tu l'aimes, mais il ... Il a eu du mal à comprendre que tu choisisses l'humanité plutôt que notre race. »

Elliot soupira. Elle n'avait pas envie d'avoir cette discussion, pas encore. Sa famille comprenait un sacré lot de panthère-garou, et elle et son frère avaient hérités des gènes. Ils avaient suivi leur père lors du divorce de ce dernier ; étant américain, il était revenu dans sa ville natale, New-York, où il avait élevé ses enfants. A l'adolescence, quand James, puis Elliot, avaient montré des signes de leur appartenance aux Panthères-Garou, il leur avait enseigné les rites et traditions de leur lignée féline. Mais Elliot ne s'y était jamais vraiment fait : les courses dans les forêts avoisinantes, les longues nuits sans sommeil, les instincts de chasseur, cela ne lui plaisait pas. Elle préférait sa vie humaine. Alors, quand elle avait fini le lycée, jeune fille timide mais intelligente, elle avait choisi de déménager. James l'avait rassurée : ils l'aideraient à emménager. Mais son père s'était désisté au dernier moment.

« Il m'en veux toujours ? » murmura t-elle d'une petite voix penaude, en regardant par la fenêtre défiler le paysage verdoyant et luxuriant.
« Je pense qu'il a toujours su que ça finirait comme ça. Bon, à droite, c'est ça ? Voilà. Regarde le panneau : Beacon Hills. Ton nouveau chez toi. »

Elliot sourit et observa tranquillement les autres voitures. Elle se souvenait de leur vie à New-York, et surtout de la période la plus difficile pour elle : le moment où elle avait dû apprendre à contrôler sa partie féline. Souvent, son regard vert devenait quasi-hypnotique, carnassier, aux reflets d'émeraude. Parfois, elle se sentait nauséeuse, et elle devait se ruer aux toilettes pour cacher des griffes ou des poils. Elle avait été seule, non parce que personne ne l'aimait, mais plus par choix. Malgré quelques amis ici et là, la demoiselle préférait éviter de s'attacher - elle ne souhaitait pas rester, et aimer risquait de la blesser. La brune s'était concentrée sur ses notes, et avait eu de bons résultats à son diplôme. Elle souhaitait entrer en histoire de l'art, et son plus grand rêve était de devenir peintre. Encore une fois, son père n'avait pas apprécié. Il aurait la voir rester chez lui, et faire une autre génération à sa race, faire un métier simple, peut-être. Son père était très vieux jeu. Trop vieux jeu même. Il voyait avec le regard de leur race, pas avec ceux d'un père qui respecterait sa fille.

Le livre glissa sur l'étagère, alors qu'elle le rangeait. James, derrière elle, était allongé sur le matelas. Elle lui avait demandé doucement de mettre un protège-draps, mais il ne l'écoutait pas. Il était insouciant, à la manière d'un chat. Elle se recula d'un pas et regarda la lumière dorée tomber sur les tranches des bouquins. Les lettres brillaient à certains endroits, formant des ombres à d'autres. Elliot sourit, fugacement. Moment de bonheur, éternité figée en une seconde, un battement de coeur. Elle aimait l'ordre. Elliot se tourna vers James et fronça son adorable nez, avant de s'approcher et de passer sa main dans les cheveux de son frère.

« Je ne vais pas trop vous manquer ? » fit-elle de sa voix basse et féminine, en s'allongeant à côté de son frère et en se serrant contre lui. De sa gorge monta un léger bruit, semblable à un ronronnement sans en être un, écho de joie, résonance d'un félin bonheur.
« Je viendrai souvent te voir. Cette ville ... Tu l'as senti aussi ? Quand on est sorti de la voiture, qu'on a porté les cartons ... Nous ne sommes pas seuls. Il a d'autres créatures, ici. »
« Peut-être que tu as juste reniflé les effluves du caniche de la voisine ? » le taquina t-elle.

Il gronda, feula et ils se levèrent, pour jouer, comme deux chatons sauvages. James finit par partir, et laissa Elliot seule dans son appartement propre et neuf. Sa première année d'histoire de l'art commençait dans deux semaines. Elle s'assit à son bureau, et prit sa guitare. Doucement, ses doigts grattèrent les cordes, appréciant le contact rugueux. Sa voix mélodieuse, un peu faussée, résonna dans le silence de la pièce, aubade mélancolique. Elle ferma ses grands yeux verts, ses cils formant des ombres sur ses joues pâles. Les sons formaient un manteau autour d'elle, rassurant. Son coeur trembla un instant, puis sembla s'éteindre en même temps que voix et instrument. Elle posa le tout sur son bureau et s'étira, féline. Mille questions voltigeaient dans sa tête, cacophonie incessante et interrogatrice, douleur d'incertitude. Mais l'une d'elle revenait, ritournelle obsédante : qu'allait lui réserver cette ville, exactement ? Pouvait-elle se faire des amis et créer des liens ? Ici, personne ne lui rappellerait sans cesse de quelle nature elle était faite. Personne ne lui parlerait des rites des panthères, personne ne l'obligerait à faire quoi que ce soit. Car elle n'était personne.


   

   Behind the screen
   Pseudo / Prénom : Tora Âge : 23 ans Tu préfères les cookies ou les tartes aux pommes ? COOKIES  :16:   Comment t'es arrivé(e) ici : en cherchant     Ton personnage préféré dans TW : Hmmm. Je ne sais pas trop, peut-être Derek ou Stiles. Fréquence de connexion : 4 à 5/7 Une ultime bafouille :