Once upon a time
   "Ma petite", avait l'habitude de m'appeler Grand-mère. Je ne pense pas avoir beaucoup grandi depuis sa mort. Mes épaules en revanche se sont élargies et mes mains sont devenues plus rêches, moins nettes, toujours incrustées de cambouis et parfois de limaille vicieuse. Le métier qui rentre, paraît-il. Souvent habillée de jeans troués et de chemisiers à carreaux élimés, j'ai parfois tendance à oublier la fille qui vit dessous, mais pourtant elle est bien là : une crinière châtain jetant ses boucles jusque dans le creux de mes omoplates, les yeux d'un étrange vert que je souligne d'un peu de khôl pour faire parfois un peu oublier mes cernes, les lèvres pulpeuses que je me mets à mâchonner dès que mes pensées vagabondent. Parfois, je me pose devant un miroir et j'essaie de déceler tout ce qui se cache sous mes vêtements un peu amples. Mais je ne vois jamais rien. Je suis douée pour cacher les choses. Toute ma vie n'est qu'un long et terrible secret.

Un client rentre dans le garage troué de courant d'air. Rob, mon patron, le salue chaleureusement. Je me contente bien souvent d'un signe de tête. Je ne suis pas bavarde, pas le genre à faire des vagues. On m'a appris à me cacher et à me taire ; le temps que je pourrais utiliser à me focaliser sur moi-même me sert à mieux observer tout ce qui se passe autour de moi. Je salue à peine ce nouveau client qui rentre mais déjà, à demi penchée sur une bécane, j'apprends tout ce que je peux de lui. Je le scrute par coups d’œil imperceptibles, j'interroge ses mouvements, je lui fais cracher le morceau à son insu. Représente-t-il un danger ? Dois-je attaquer, m'enfuir, l'ignorer ? Tout est pour moi une menace. J'ai été élevée dans le danger permanent, je ne suis jamais tranquille. Je suis un échec, une rature sur l'oeuvre de l'art de vivre heureux. Je hais rarement, mais je me tiens prête à mordre et à user de violence à tout moment. C'est ce qu'on m'a appris. Je ne m'en porte pas bien pour autant.

Huit ans est l'âge auquel j'ai commencé à comprendre que ma vie n'était pas de celle dont les gens rêvaient. Ma mère était morte, mon père sans arrêt absent, Grand-mère constamment fatiguée à force de me donner tout l'amour que d'autres auraient dû me donner. Et puis un jour, mon père est arrivé dans la cour de la ferme avec Edrian, mon frère aîné. Tous les deux avaient tellement changé... Mon père a voulu parler seul à seul avec Grand-mère. Il y eut des cris et des pleurs, et puis sa mine tétanisée lorsqu'elle est sortie de la chambre. Le soir même, mon père m'emmenait. J'ai vu des kilomètres de route, de la route à n'en plus finir, des hôtels louches, des individus plus louches encore. J'ai fini par comprendre que mon père et Edrian n'étaient pas les vendeurs d'antiquités qu'ils prétendaient être. L'arrière du camion ne renfermait en fait que des armes, des fioles, des livres et des objets étranges. C'est comme ça que j'ai appris que les créatures qui peuplaient mes cauchemars n'étaient pas de simples dessins dans mes livres de contes, comme ça que j'ai appris à les chasser dans la réalité. Comme ça que je suis devenue une tueuse. Les monstres n'eurent bientôt plus aucun secret pour moi : je savais trancher, couper, arracher, écorcher, brûler, étouffer, saigner, quand d'autres de mon âge apprenaient à faire de la peinture ou de la musique. Le sang fut ma peinture, les cris d'horreur ma musique. C'était le business familial. Au-delà de faire mon travail, je deviens même douée et le nom des Macklewane se murmurait de plus en plus parmi les chasseurs. Une nuit pendant une chasse, notre père fut abattu d'une balle dans la tête. Deux mois plus tard, je perdis mon frère au terme d'une course folle avec des harpies. Je me retrouvai seule, hagarde et meurtrie, violemment frappée par la réalité. Je ne pouvais plus continuer tout ça, car il y avait encore une chose que je ne voulais pas perdre. Lorsque j'ai fait mon apparition sur le seuil de la porte, Grand-mère s'est servie de ses maigres forces pour se lever et venir me serrer aussi fort qu'elle le put dans ses bras. J'étais enfin de retour à la maison.
J'ai vingt et un an maintenant. Grand-mère est morte, partie doucement dans son sommeil avec la certitude qu'un monde meilleur l'attendait plus loin. A part tuer, je me suis aperçue que je me débrouillais bien avec la mécanique, ayant réparé le camion de mon père un nombre incalculable de fois. Rob m'a offert du travail et j'habite maintenant à Sayona, petite ville coincée entre Boston et Beacon Hills. J'y suis bien. Je ne fais plus de vagues. Les deux couteaux dans mes bottes, celui à ma ceinture, mon pendentif en argent, mon bracelet en sorbier et mes deux canons d'avant bras -tout cela correctement dissimulé sous des vêtements amples et trompeurs- sont les seuls vestiges de mes anciennes habitudes. Déformation professionnelle.


   

   Behind the screen
   Pseudo / Prénom : Lysandre Âge : 23 ans Tu préfères les cookies ou les tartes aux pommes ? Choix difficile ! =o ... les tartes aux cookies ? Comment t'es arrivé(e) ici : en cherchant désespérément un forum bien classe Ton personnage préféré dans TW : Stiles (but what the hell is a Stiles ?) Fréquence de connexion : quotidienne Une ultime bafouille : D, la réponse D ;)