Rester chez soi ce n’est pas si mal que ça, du moins c’est ce qu’Oreste se dit alors qu’il est avachis sur son canapé. Ça ne lui arrive pas souvent, mais là, sa petite gueguerre contre le don que lui a légué sa mère commence à le fatiguer. Il n’a jamais passé autant de temps aussi loin de la nature. Il a même offert sa plante verte à sa voisine. Plus rien n’est vert chez lui. Il pense même à se nourrir uniquement de junk food histoire d’être sûr de ne plus rencontrer de verdure. Ulysse n’est pas au courant et c’est peut-être mieux ainsi. Il prendrait son petit frère pour un fou, c’est certainement ce qu’il est d’ailleurs.

Contrairement à ce qu’il aurait pu le croire, ça le touche beaucoup plus que prévu. Bien entendu, il a toujours été au contact de la nature, il n’a jamais été du genre à passer des heures à l’intérieur à jouer à la console. Non, lui c’était plutôt du genre à courir dans le jardin et grimper aux arbres jusqu’à ce qu’il ne puisse plus voir le bout de son nez à cause de la nuit tombée. Il n’avait jamais vraiment fait le rapprochement avec sa vraie « nature » maintenant qu’il essaye de la repousse il commence à comprendre l’ampleur de ce truc qu’il a en lui et l’air de rien - et même s’il ne l’avouera jamais - ça commence à le faire flipper.

Couché dans son canapé, dans son petit appartement, Oreste attend sa pizza cannibale - oui, parce que même là, il ne prend pas de verdure, juste pour être sûr - vu comme ça, on dirait un peu une larve. Il est dérangé dans la contemplation de son plafond par un coup donné à sa porte d’entrée. Il se lève au bout de quelques secondes, pensant que c’est le livreur de pizza qui vient lui livrer sa précieuse pitance. Sauf qu’en fait. Non. Quand il ouvre sa porte son visage change. Ythel. Il a toujours le bon moment pour débarquer celui-là. « Qu’est-ce que tu fais là ? » lui demande-t-il avec une douceur incomparable - ironie ? - ce n’est pas comme s’il n’était pas d’humeur après tout.